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Pourquoi faire faire plus d’heures sup pour augmenter la production n’est pas toujours la meilleure idée

  • 26 avril 2025

Beaucoup d’entreprises continuent de croire que plus d’heures de travail équivaut à plus de résultats. Pourtant, au-delà d’un certain seuil, cette logique s’effondre. Fatigue, baisse de productivité, risques pour la santé : les effets pervers du surtravail sont bien réels. Alors, faut-il vraiment continuer à pousser toujours plus fort ? Tour d’horizon des limites et alternatives aux heures supplémentaires.

Une croyance bien ancrée

Beaucoup d’entreprises considèrent encore que la solution la plus immédiate pour augmenter la production est de demander à leurs salariés de multiplier les heures supplémentaires. Cette pratique repose sur une logique simple : plus de temps travaillé, plus de tâches accomplies. Cependant, la réalité est souvent bien différente. Au-delà de certaines limites, les heures supplémentaires peuvent non seulement devenir inefficaces, mais aussi avoir des conséquences négatives pour la productivité et le bien-être des employés.

Pourquoi ce phénomène ?

Une étude réalisée dans le secteur de l’informatique révèle un phénomène intrigant : si le nombre d’heures supplémentaires augmente de 20 heures par semaine, la production croît initialement pendant quatre semaines. Cependant, au-delà de ce délai, la productivité s’effondre, au point de devenir inférieure à celle obtenue en respectant une semaine de 40 heures.

Les raisons sont multiples et éclairantes :

  • La fatigue s’installe, entraînant une baisse de créativité et une augmentation des erreurs.
  • Le manque de temps pour se ressourcer exacerbe le stress, réduisant ainsi le bien-être global.
  • Les troubles musculo-squelettiques (TMS) deviennent plus fréquents, tout comme les comportements dangereux augmentant le risque d’accidents.

De nombreuses études confirment également un lien entre des semaines prolongées (55 heures ou plus) et des risques accrus pour la santé, notamment des pathologies cardiovasculaires. Par exemple, une étude publiée dans The Lancet en 2015 indique que les personnes travaillant 55 heures par semaine ou plus présentent un risque accru de 33 % d’accidents vasculaires cérébraux par rapport à celles travaillant entre 35 et 40 heures.

Une question ancienne

Cette corrélation négative entre durée du travail et productivité n’est pas nouvelle. Dès 1914, le gouvernement britannique, sous pression pour produire des munitions pendant la guerre, avait étendu le temps de travail à 90 heures hebdomadaires. Cependant, un comité de santé des ouvriers mis en place en 1915 a démontré que cette stratégie, loin d’être efficace, entraînait une baisse de la production au-delà d’un certain seuil d’heures travaillées. En outre, les travailleurs perdaient leur capacité à évaluer objectivement leur propre productivité, la surestimant systématiquement.

La loi d’Illich

Ce phénomène est synthétisé par la loi d’Illich, énoncée en 1980 par Ivan Illich, ancien prêtre et professeur à l’université d’État de Pennsylvanie. Cette loi postule que, passé un certain seuil, travailler davantage n’augmente pas la production, mais la réduit, en raison d’une saturation physique et mentale des individus.

Des expérimentations récentes sur la réduction du temps de travail

Des exemples contemporains montrent que la réduction des heures de travail peut être une alternative viable. En Allemagne, des entreprises ayant testé la semaine de quatre jours avec le modèle “100-80-100” (100 % du salaire pour 80 % du temps travaillé, tout en maintenant 100 % des performances) ont rapporté des gains significatifs (Huffington Post). Selon une étude menée en 2024, 73 % des entreprises participantes souhaitaient adopter cette organisation de manière permanente, citant une productivité stable ou en hausse et une amélioration du bien-être des employés.

Au Royaume-Uni, un projet pilote impliquant près de 100 entreprises a conduit à des résultats similaires (Cadena Ser). Les employés travaillaient quatre jours par semaine tout en maintenant leur niveau de rémunération. Les entreprises ont constaté une productivité accrue et une meilleure satisfaction au travail, ce qui a poussé de nombreuses structures à pérenniser cette approche.

En Suède, Toyota a réduit les roulements de ses employés à six heures par jour depuis plus de 13 ans. Cette initiative a permis non seulement d’améliorer la productivité, mais aussi d’augmenter les profits, tout en renforçant la satisfaction des employés.

Quand les heures supplémentaires sont-elles la bonne solution ?

Il ne s’agit pas de bannir systématiquement les heures supplémentaires. Dans certains cas, elles peuvent même constituer une solution très efficace, à condition d’être limitées dans le temps, accompagnées d’objectifs clairs et suivies de périodes de repos pour recharger les batteries. Ces moments d’effort collectif peuvent même renforcer la cohésion d’équipe lorsqu’ils sont bien gérés.

En revanche, pour éviter les effets pervers, les heures supplémentaires doivent rester l’exception et non la règle. Elles doivent être réservées à des périodes critiques clairement identifiées et accompagnées d’une réflexion approfondie sur leur impact potentiel.

Des alternatives pour les entreprises

Pour répondre à des besoins de production sans augmenter la charge de travail, les entreprises peuvent explorer d’autres pistes :

  • Recruter du personnel supplémentaire : même temporairement, cette solution peut répartir la charge et préserver le bien-être des équipes.
  • Optimiser les processus : automatisation, révision des procédures ou réduction des tâches sans valeur ajoutée peuvent libérer du temps.
  • Encourager une meilleure gestion du temps : formation des managers et des équipes pour prioriser efficacement et éviter le gaspillage d’énergie.

Un conseil final

La prochaine fois que vous envisagez de faire faire des heures supplémentaires, prenez le temps de la réflexion. Pesez les avantages immédiats contre les impacts potentiels sur vos équipes et sur la performance globale de votre organisation. Parfois, il vaut mieux investir dans des solutions alternatives et durables pour bâtir une entreprise plus performante et humaine.

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